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6 juillet 2012 5 06 /07 /juillet /2012 09:43

Cette année Montpellier danse ne crée pas le vent de réactivité connu l'année dernière, avec l'accueil d'artistes Israeliens.

Mais la programmation offre un regard  intime sur l'expression du monde arabe et oriental.

 

En premier lieu , j'y ai découvert Bouchra Ouizgen et ses 3 partenaires. Leur représentation du quotidien de la femme à travers une voix masculine a bousculé les genres. J'y ai vibré dans les secousses des gestes répétitifs de travailleuses acharnées qu'elles sont ; j'ai amorti les coups de reins  dans les ébats forcés; j'ai souffert dans leur accouchement vers la liberté de bouger, de s'exprimer, de penser et j'ai souri , les yeux brillants partageant  leur plaisir vers de libres mouvements.

Ce qui nous semble naturel dans notre pays, se transforme en combat pour elles. Leur force collective me nourrit. Je partage cette dynamique.

 

Radhouane el Meddeb, nous emmène en voyage en Egypte. Le chant d'Oum Kalthoum rempli tout l'espace. Nous sommes transportés en 1966 au Caire . La musique des sixties rejoint la soif d'émancipation du 21ème siècle. Ce chant d'amour résonne jusqu'au bout des phalanges de Reddouane. On perçoit une forme d'extase.Son corps bien en chair porte la séduction de cette femme et de toutes les femmes; celles de Bouchra, celle des peuples arabes, celles du public. Son corps secoué de bas en haut traverse l'intérieur de nos viscères et de nos pensées.

Nous assistons une fois de plus au mélange des genres. Un homme porte la voix d'une femme. Et il a un port de tète haut.

Quelque soit l'individu, le message d'amour, de révolte est le même. Les écrits réactionnaires et étriqués volent en eclats. Les voiles tombent. Seuls subsistent le corps et la voix et ce qu'on en fait par désir de survie.

La force de ces représentations unie hommes et femmes, ensembles. Dans notre société occidentale, nous sommes aussi en lutte et dans le désir d'être à égalité. 

La salle est à moitié pleine et je le regrette, car ce moment vécu méritait une plus large diffusion.

Le lendemain dans la cour de l'Agora, un haut parleur  hurle . Les mots claquent contre les piliers de cet espace, vide et vierge comme le terrain laissé par l'après révolution. Le champs est libre. Tout est à reconstruire.

Le public est autour de Reddouane qui reprend sa marche, ses vibrations charnelles. la pression monte en même temps que la musique. Mon effroi monte également crescendo. Quel sens cette représentation a? Pour quel public elle se joue? J'ai l'impression de me tromper d'endroit, car je sens les personnes autour de moi dans l'incompréhension. J'aimerai partager ce moment, dehors, dans des quartiers, des lieux de vie. La performance de François Rascalou revient à ma mémoire , ainsi que ses habitants touchés par l'expression artistique qui les surprend, au détour des galeries marchandes.

Là, dans la clarté  du cloitre, qui est vraiment touché? entre ces sextagénaires bourgeois, les professionnels de la culture...Je sens une distanciation, et je le regrette. J'entendrai une femme autour du buffet d'après spectacle " Je n'ai pas trouvé que c'était de la révolution dont il parlait..."

 

Hooman Sharifi nous a dévoilé son âme. La respiration de Vincent Macaigne nous enveloppait dans ce chaos.

Il a tordu les corps, déchiré le sol , hurlé les voix, frappé les pierres, enserré les tissus avant de les jeter, craché...lentement comme un enfant qui arrose pour rire,  puis ensuite, penché comme un adulte qui souffre, lentement dans son dégoût de vomir.

Sa société perd ses fondements, son patrimoine, ses savoirs, sa richesse de la connaissance, son  humanité.

Tout le plateau explose sur tous les plans. La vidéo expose des dessins noirs de personnages animalisés traversés d'objets contondants. Je repense à Persépolis. Je suis triste pour cette jeunesse créative sinistrée. Mais suis admirative par cette nouvelle force d'existerà tout prix.

Il nous propose un feu d'artifice d'images, qui en se rapprochant deviennent plus nettes. Comme si d'une oeuvre artistique notre vue globale s'affinait pour mieux y distinguer les détails de l'horreur.

Oui, nous refusions de voir . Le public refuse ce noir, cette souffrance si loin mais si proche tout à coup.

Le rêve pointe dans le rassemblement des papiers qui transforme les comédiens / danseurs en sorte de grands personnages extraordinaires. Leurs ailes nous emportent. Les paillettes, le métal renforcent la carapace de l'imaginaire.

Dans le monstrueux , se révèle le beau, comme dans la noirceur de la belle et la bête de Cocteau.

Nous sommes dans le surréalisme de l'enfer et du paradis.Et j'y fouille encore...

 

Sylvie Lefrere.

Montpellier danse juillet 2012. Bouchra Ouizgen."Ha!" 22, 23 et 24. 07.12.

Radhouane el Meddeb et Thomas Lebrun" sous les pieds le paradis" 1er au 3.07.12 .

Radhouane el Meddeb " 14 janvier 2011" le 5.07.12

Hooman Sharifi " Then love was found and set the world on fire" 5 et 6.07.12

 

chaos-iranien.jpg

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