Je m'appelle Constance Leclair. J'ai 25 ans.
Je suis en vie. Je suis vivante. Je suis dans cet espace de grandir. Je n'ai jamais supporté d'être petite. En taille, en faire. Les droits et les interdits. Les cadres et interdits.J'ai besoin de déborder pour grandir comme je l'entends, sinon je vais devenir sourde. J'ai besoin d'être à l'écoute. J'ai besoin d'être entourée par les autres, ceux avec qui je vais développer une entente, pour m'imprégner de ce monde en porosité, en confiance.
Enfant, qui m'a fait confiance ? Je ne sais plus, je ne sais pas. Mais aujourd'hui, quand une confiance pointe, je la sens comme une exception. Un cadeau bien plus important qu'une simple boite à ouvrir. La confiance, je la perçois comme une enveloppe. Tout à coup rassurante, qui me recouvre en baume bienfaiteur et qui me porte au dessus du sol. Elle m'élève...
Petite, j'ai eu trop peu cette sensation. J'ai été trop petite jusqu'à ma majorité. Puis, j'ai eu enfin un souffle. Celui de l'émancipation. Mon prénom et mon nom trouvaient toute leur place, « Constance Leclair ». Une voie s'éclairait dans la constance de mes choix. Enfin j'étais libre de choisir. De faire ce dont j'avais envie, D'aller où je le désirais, en me donnant les moyens de ne plus subir.
Grandir c'est être tiré vers le haut, accompagnée, rassurée. Si la solitude de l'enfant domine dans ce monde de pouvoir d'adulte, le parcours est long, si long, trop long.
J'ai vécu ce sentiment de ne pas me sentir à ma place. De ne pas savoir quoi dire. De ne pas apprécier le lieu où je me trouve. De subir l'ennui.
Cette émancipation, je me la crée un peu chaque jour depuis mes 18 ans. Je me sens en construction, pas à pas, cherchant à satisfaire, dans la mesure du possible, mes explorations.
Je découvre le sentiment de la joie devant le renouvellement permanent. J'avance sans cesse. Jusqu'où j'irai ? Qu'importe. Les opportunités sont là à ma portée et favorisent cette confiance qui ne m'a jamais été transmise.
Je suis comme une féline, intuitive, observatrice, qui cultive sa force et sa douceur. J'ai soif d'apprendre et me laisse griser. Parfois je suis dans une excitation de pilote de course. Je frôle des dangers, ne mesure pas toujours les risques, mais aborde les tournants avec adresse. Quelques embardés me bousculent et je retrouve ma trajectoire.
Elle me tire vers ce grandir. J'ai peut être stoppé ma croissance mais pas mon ascension. J'ai l'impression que je vais découvrir tous les métiers : Explorateur, pilote de formule 1, guide de montagne, soignant...
La vie me réserve cette panoplie de déguisements que je vais revêtir tour à tour. Dans ces jeux de rôles, je vais chercher l'enveloppe qui me conviendra. Je la cherche encore. Les années vont défiler et m'accompagner dans cette quête.
Un linceul sera peut être un jour celui qui me siéra le mieux, mais mon corps gardera les empreintes de toutes ces expériences de vie. Les autres l'apercevront à travers les sillons de mes rides, l'éclair de mes yeux, la constance de mon humeur...
Je suis Constance Leclair, 25 ans, en sursis, en grandir permanent dans ma vie propre.
Sylvie Lefrere.