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20 juin 2013 4 20 /06 /juin /2013 22:17

james-thierree-tabac-rouge-evoque-ce-flottement-entre-le-th.jpg

 3ème semaine du Printemps des Comédiens.

Après une pause de deux jours, je suis épuisée par le manque... Deux soirées de sevrage, pour mieux retrouver le grand Chapiteau rouge.

La silhouette souple de James Thiérrée se dessine entre les pins, et en un éclair je reconnais l'ombre d'un Chaplin. Est ce la canne qu'il tient à la main, ou un port de famille comme dans " le Kid", qui me procure cette vision?

Je suis dans une excitation de grand soir. Le plateau est habité de fils, de métal, d'un échafaudage. Nous sommes dans une origine circassienne, basculant dans un autre siècle; Pris dans les rouages d'une machine à remonter le temps, prisonniers dans les différentes couches terrestres.

La longue silhouette  d'un homme se détache. Il habille les premières notes de musique par des mouvements de danseur de Hip hop. Nous allons voyager dans les allers et retours permanents qu'il nous propose.

Cette année, le printemps 2013, me questionne...Je vois une succession de pièces de théâtre où les mécaniques de rotations sont omniprésentes. Ne tournent t'elles pas rond ou au contraire  sont elles en dynamique, engagées  vers un changement? Le temps d'un processus est posé.

Tous les danseurs se déplacent comme des insectes, vivants dans une société souterraine. Le dehors est tellement insupportable que tout se joue en sous sol. De l'ombre, jaillira la lumière.

Un échafaudage pivote sous toutes ses facettes, de tuyaux, de plaques de métal, de panneaux réfléchissants. Ils semblent nous dire," regardez vous" de plus près...Il nous donnent aussi à voir dans le flou, ou le plus net. Myopes ou presbytes? Nos visions sont brouillées par plusieurs pistes. La réflexion de James est foisonnante, et les miroirs en sont tous ses regards.

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Les femmes sont "décharnées", petites fourmis ou araignées actives. Elles agissent, séduisent prestement.

Les danseurs/acteurs sont les fantômes des temps anciens au milieu de ses objets désuets. Leurs vestes blanchies par la poussière virevoltent de bras en corps, de  l'homme à la femme; tout est interchangeable. Rien ne se fige.

L'échafaudage plat scintillant, est la représentation de nos modes de pensée. Il est en dynamique, en recherche. Il offre différents points de vue, et tournoie rapidement comme pour saisir le meilleur angle. Les corps des danseuses se réfléchissent. êtres de pensée et de vivacité. Tout s'articule dans un temps moderne, clin d'oeil à son grand père qui dénonçait déjà les aberrations de la société industrielle au début du siècle.

DenisLavant.jpg

Denis Lavant, personnage central, est un pacha silencieux, au regard du naïf du village. Il glisse sur scène de son  corps d'enfant. Tout comme lui, il dégage une grande force et une résistance. Il traverse le temps et les âges. Ses traits nous parlent de sa vie, riche en expériences diverses. Sa touche de folie douce me transperce. Sa paisible désinvolture habille le plateau, complémentaire de l'énergie des danseuses qui gravitent autour de lui. Comme un vieil indien qui fume le calumet de la paix , il est la référence. Des volutes de fumée, s'échappe l'utopie rêvée, l'échappatoire.

Le souffle des mouvements nécessaires soulève les plaques de métal et son grondement nous réveille. L'exploration de la structure est complexe. Elle se construit, se démonte, se façonne. C'est un radeau des temps modernes. Il éclate finalement en  fragments de différents miroirs. Facettes pour nous ouvrir le champ.

Je souris en remarquant que James Thierrée, de sa place de citoyen Suisse, nous offre cette vision sur nous même, sur les autres et sur le monde qui nous entoure. Il puise dans une expression bouillonnante de mécanismes, de corps et nous laisse entendre une nouvelle langue, qui pourrait être un esperanto réinventé.

Le chapiteau est devenu un vaste volcan, foyer de réfléchissants, d'êtres hybrides, dans un monde foisonnant. Est ce celui qui attend nos enfants?

 

Sylvie Lefrere

 

" Tabac Rouge" de James Thiérrée, au Printemps des Comédiens du 16 au 20 juin 2013.

 

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